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POÉSIES HOMOSEXUELLES : Gay, Lesbienne, Trans, Bi
18 septembre 2018

Un thermalisme urinaire

Il venait d'entrer dans la salle-de-bain dans laquelle je me trouvais et, comme s'il était naturel de sortir sa verge en présence d'un autre homme, ami certes, mais pas intime, il se soulagea dans les wc tout en m’expliquant quelque chose que je ne compris pas.
Mon cerveau venait de se suspendre dans une catalepsie de toute cognition qui ne percevait plus du coin de l’œil que la ligne blanche d’un slip généreusement éloigné de son ventre sur lequel s’ourlait à présent tout un pubis de limaille noire, une sorte de nuit masculine qui avait pour matin sa peau et pour soir, les quelques lumières qui me permettaient de voir ce que je voyais. L’organe lui était sombre, il finissait toute en pointe sur une rose molle.

Pour lui souligner l'incongruité de la situation, son inconvenance, à mon tour je pris le partie de l’outrance et de façon tout aussi indifférente et mécanique je m’emparais d’un verre sur la tablette du lavabo et tout en faisant mine de l'écouter attentivement, je vins nonchalamment le placer sous son jet d’urine puissante et le rempli.
Il ne recula pas d'un millimètre. Ne fit aucun mouvement d’aucune sorte. Laissa faire. Juste, il parlait.
Lorsque le verre fut plein de ses eaux jaunes et miraculeuses, je le sentis tout d'abord avec attention, puis je le bu. D'un trait. Je recommençais cela plusieurs fois comme n'importe quel curiste l’aurait fait avec les eaux des thermes de Vichy depuis le 19e siècle à part que là, le robinet était de chair et il s'agissait de pisse. Quelques minutes au-paravent, ces mixions se balançaient closes contre la paroi hermétique d’une vessie pleine de garçon, cachée sous son ventre chaud et poilu.
Son outre s’était remplit d’usages divers mais jamais elle n’aurait put imaginer que le fruit mûr de sa récolte quotidienne puisse faire les délices d’un autre. Moi non plus d’ailleurs.

J’étais horrifié par ce que j’étais en train de faire et ne savais plus comment m’arrêter et je tentais de rester aussi naturel que lui. Sûr de mon fait.

Lui il parlait, parlait, tandis que moi je buvais, buvais ! Effaré et transi.
Je crois que je ne repris mes esprits que lorsque le jet se tarit. Il secoua ses toutes dernières gouttes trémulantes qui distribuaient leurs perles dispersives et vint ensuite s’essuyer résolument sur le bord de mon gobelet. Un petit fils fragile relia un court instant le verre à son prépuce puis se rompit comme l’or des Aztèques.

Je portais à mes lèvres ce qu’il restait à boire avec une pointe d’embarras, et le reposais sans même le rincer. Ce qui advint après me paru une éternité. Il ne me restait que ce soleil acide et tiède qui semblait venir tout droit de Toscane et lui sur mon côté qui venait de se taire. Il aurait sûrement fallut que je parle à mon tour mais je ne savais pas quoi dire. Il aurait fallu qu’il enchaine, se rhabille comme tout homme se rhabille et parte mais il semblait m’attendre. Quelque part, moi aussi je l’attendais mais respirer me paraissait la dernière chose à faire. J’avais envie de mourir mais la vie me flanquait d’une attente que lui aggravait.
Il était là je le sentais, je le sentais dans ma bouche et c’est parce que je le sentais dans ma bouche qu’il ne fallait plus qu’il devint autre chose.

J’avais bu ses urines, ses contagions de monstre de sueurs et de souffles. Et lui m’attendait. Comme dans le vide d’une excuse qui ne vient pas et se transforme soit en bonheur soit en crises de larmes pour plusieurs étés.

“J’aurais du fermer la porte à clé.” ou quelque chose d’approchant pour que ce qui se passait n’advint jamais mais là on ne me demandait pas ce que j’aurais du faire mais de faire ce que j’avais envie de faire avec cet homme qui m’attendait et dont je venais de boire l’urine de sa vessie. Moi aussi je l’attendais mais je ne savais plus comment le rejoindre ou alors peut-être par le dos, reculer doucement sur lui jusqu’à ce que sa bouche me brûle juste derrière l’oreille. Appuyer mon épaule contre lui jusqu’à ce qu’il se passe quelque chose qui lui permis de prendre le relais.

N’importe quoi, je dis n’importe quoi. Le seul truc valable aurait été que ça ne se soit jamais passé mais c’était mort. Putain mais je ne rêvais pas, j’avais bien vu sa queue, il me l’avait fait voir, me l’avait fait surprendre sa gousse d’infamie aux outrances de lunes, aux nacres de calcite toutes fendues sur ses rayures de fontaine. J’avais vu son pénis, enfin je crois que c’était son pénis, je n’étais plus très sûr et encore moins d’exister, seul régnait un autre souffle que le mien, animal et incomplet. La meurtrissure d’une garçon qui m’observait.

Bon sang de bon sang c’était bien lui qui avait surgit dans la salle-de-bain dans laquelle j’étais, je n’avais rien demandé moi et là, son impolitesse devenait la mienne. Je n’avais rien demandé moi. Moi j’étais juste là. J’étais ici. J’étais devant ce miroir. Et maintenant, par sa faute, par sa putain de faute, la surface biseautée du miroir ne faisait plus que refléter sa masse terrible et attentiste. Il me rendait impropre à moi-même. Il me prolongeait, me raréfiait.

Même espérer qu’il parte m’était impossible.
Qu’il aille ailleurs m’aurait effacé.
Pour bien faire, il ne faudrait plus que nous quittions cette salle-de-bain. Il faudrait que nous y restions jusqu’à la destruction de l’immeuble qui la contenait, quel que soit le nombre de locataires qui s’y succèdent, aussi longtemps que lui constituerait un retour.

Il faut que vous sachiez que l’homosexualité à mon époque ne se nommait pas impunément. Elle existait, diffuse, se propageait de rencontres en passions sournoises et indistinctes comme passent les navires puis mourait comme tout amour dans des liserés de larmes contenues qui ne pouvaient être dites. Bien sûr dans l’histoire il y eu des périodes plus propices à ces intrications devenues parfaites dans ces fondements humains, je savais que des gars se muraient en eux-même pour s’y retrouver vainqueurs et bandits de quelque choses. Ils se bannissaient du reste du monde mais, comptait-il à cet instant celui-là ?

En tout cas on en parlait dans la presse. Ça faisait les colonnes des faits divers, décrivant par le détail comment le pays pouvait être la proie de ces contingences indignes et que, seule la politique du gouvernement valait pour contenir tout ça. Qui voudrait vivre dans un monde où ces adeptes de l’outrance venaient à la rencontre du vice pour le propager et se gaver de la vertu non point pour s’en nourrir mais la distendre. Et là, la spécularité des miroirs venait de m’enfermer dans une ornière du temps. Cette verge imprégnait ma rétine comme une ampoule fabuleuse que je voulais à moi. Le peu que j’en avais vue me semblait interminable et parfaitement répugnant comme doit répugner toute verge qui, nue, bouscule ce qu’il nous reste à vivre. Cette ampoule fermée dont j’avais bu toute la lumière s’animait encore par en-dessous comme la tectonique d’une erreur pendante et lourde. J’avais la mienne propre de laquelle je pouvais tirer toutes les conclusions imaginables et toutes me ramenaient à la sienne. Elle si peu. Elle si éteinte. Elle si conclusive. Elle partout en moi se propageait comme une fractale de la bite.

Rien de cet homme pouvait m’être étranger. Lui il ne faisait que respirer derrière moi et ce qu’il respirait m’envoyait ailleurs mais pas sans lui. Tout d’un coup, son souffle devint le mien. Quand je respirais il respirait, quand il respirait c’était mes poumons qui s’enflaient et moi qui soufflais par mes narines son expiration.

Il n’avait pas tirer la chasse d’eau, il était là, il m’entendait et moi j’étais là et je l’entendais aussi, incapable de voir plus loin. Je voyais juste l’eau des chiottes jaune et spumescente.

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▌©Alain Cabello-Mosnier (18/09/18)

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