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POÉSIES HOMOSEXUELLES : Gay, Lesbienne, Trans, Bi
28 décembre 2020

Marco - issu des Poèmes saturniens

Marco - issu du Recueil : Poèmes saturniens de Paul Verlaine (1866).

 

Marco

Quand
Marco passait, tous les jeunes hommes
Se penchaient pour voir ses yeux, des
Sodomes
Où les feux d'Amour brûlaient sans pitié
Ta pauvre cahute, ô froide
Amitié ;
Tout autour dansaient des parfums mystiques
Où l'âme en pleurant s'anéantissait ;
Sur ses cheveux roux un charme glissait ;
Sa robe rendait d'étranges musiques
Quand
Marco passait.

Quand
Marco chantait, ses mains sur l'ivoire
Evoquaient souvent la profondeur noire
Des airs primitifs que nul n'a redits.
Et sa voix montait dans les paradis
De la symphonie immense des rêves,
Et l'enthousiasme alors transportait

Vers des cieux connus quiconque écoutait
Ce timbre d'argent qui vibrait sans trêves.

Quand
Marco chantait.
Quand
Marco pleurait, ses terribles larmes
Défiaient l'éclat des plus belles armes ;
Ses lèvres de sang fonçaient leur carmin
Et son désespoir n'avait rien d'humain ;
Pareil au foyer que l'huile exaspère,
Son courroux croissait, rouge, et l'on aurait
Dit d'une lionne à l'âpre forêt
Communiquant sa terrible colère,

   Quand
Marco pleurait.
Quand
Marco dansait, sa jupe moirée
Allait et venait comme une marée.
Et, tel qu'un bambou flexible, son flanc
Se tordait, faisant saillir son sein blanc :
Un éclair partait.
Sa jambe de marbre.
Emphatiquement cynique, haussait
Ses mates splendeurs, et cela faisait
Le bruit du vent de la nuit dans un arbre,

Quand
Marco dansait.
Quand
Marco dormait, oh ! quels parfums d'ambre
Et de chairs mêlés opprimaient la chambre !
Sous les draps la ligne exquise du dos
Ondulait, et dans l'ombre des rideaux
L'haleine montait, rhythmique et légère ;
Un sommeil heureux et calme fermait
Ses yeux, et ce doux mystère charmait
Les vagues objets parmi l'étagère,

Quand
Marco dormait.

Mais quand elle aimait, des flots de luxure
Débordaient, ainsi que d'une blessure
Sort un sang vermeil qui fume et qui bout,
De ce corps cruel que son crime absout ;
Le torrent rompait les digues de l'âme.
Noyait la pensée, et bouleversait
Tout sur son passage, et rebondissait
Souple et dévorant comme de la flamme.
Et puis se glaçait.

Poème de Paul Verlaine

 

 

 

 

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