▌⏏ Aux initiales de ses lèvres
A dire vrai, je me langui de lui mais à la seule condition que ma peine n'en dise pas davantage pour qu'au plus longtemps que cela se puisse, il continue à courir des années encore dans la lande de mes rêves. Je veux sentir ses pieds sales sur mes draps blancs, un cadeau de leur lin à ses charbons de négligence, et voir oreillers et traversins se déchirer tour à tour de son sourire taquin.
Il n'y a pas que le soleil qui passait par la fenêtre, il y avait ses baisers, ses lèvres entre-ouvertes comme un couché au soir d'une de nos journées, je veux de leurs automnes, me nourrir de ses erreurs mais pas de ses absences. Alors, vous savez quoi ? Par là où le soleil se glissait jadis, j'ai accroché dans les rideaux une mèche de ses cheveux comme s'ils étaient là, prêt à bouger au moindre souffle de qui ce ce soit. Ils sont ici depuis vingts ans mais que puis-je faire d'autre que d'adorer, et de quelques intérieurs où je fusse, dès que j'y entrevoie le ciel, sous ces gazes blancs, je crois y voir son dos.
Ce n'est point au pied d'un arbre que je souhaitais être enterré mais aux pieds d'un homme, et j'aurais tant voulu que ce fussent les siens, les siens pour toujours.
Aux initiales de ses lèvres brodées quelque part en un coin de ma mémoire, je baise le souvenir de l'avoir aimé et, qu'à l'aurée de ses sourcils, je puisse m'étonner encore que l'automne soit arrivé si vite. Mais voilà, il était dans ma tête désormais, sous un lit de feuilles rarement peignées, et aux carreaux de tristes paupières battues par les pluies.
Au nom de toutes les chandelles mortes à nos grés d'écrivains, c'est sous cet océan de cire que je nous veux étendus, préférant aux marbres éternels, nos chaleurs de paraffine et de textes incomplets.
Écrits par le poète queer ©Alain Cabello-Mosnier (poète gay & masseur à Paris) ⚣
dimanche 12 avril 2020, Paris
Note de proximité poétique : 14/20
Il s'agit d'une note subjective que j’octroie à mes textes.