Un torse sous sa chemise
Synopsis : un ami veut passer me voir afin de me soutenir dans mon deuil, pourtant je refuse parce que je sais qu'il ne pourra pas s'empêcher de vouloir me baiser malgré l'instant terrible. Je lui explique que je veux profiter de cette distance pour me couper définitivement de lui, qu'il n'est, ni bon ami, ni bon amant. Ce qui m'a fasciné dans ce montage, c'est justement la permanence de l'éros jusque dans le thanatos consignée dans la poésie. Je pleure et pourtant, j'ai envi qu'il me possède sans vergogne malgré mes sanglots tout en le lui refusant.
Techniquement je me suis astreint toutes les deux strophes à donner une sonorité de rimes dont la réponse change de genre. Je me suis aussi complu à l'un de mes traits favoris, parler de sexe en 2024 dans une forme classique, presque désuète tant le corps conserve quelque chose d'aussi irrésistiblement jeune par la naissance qu'incontestablement vieux par ses origines.
Le plus cher de mes vœux ? Ma nuit sans tes étoiles,
jamais je ne pourrais revivre tes octrois,
ton torse en chemise couvert par sa grand voile,
tes bouées de tétons jetées si prêt de moi
Je ne saurais passer de la mort à l'Amour,
sentir en même temps tes satanés cap Horn,
où couleront mes pleurs à la traîné macroure,
et le mythe arc-en-ciel fait du sang des licornes
Le temps suspendu de ma mère décédée,
ne me fait rien vouloir de cet homme qui vient
Brillantes de sueurs, tes laves émaillées,
ne me lieraient qu'à leur losange d'Arlequin
Ce crime à châtier qu'il te faut mettre au fer,
livrant tes amants nus aux pieds de tes remparts,
de tes gemmes de pins il me faut me défaire,
et laisser se fermer leurs incises de cares
Je renonce à tes yeux, à tes cheveux d'épeautre
N'ayant été ni bon ami ni bon amant,
je saurais me passer et de l'un et de l'autre
corps et encor, toi, moi, aux cris des cormorans
Tes caresses valaient bien moins que jeu de jass,
tant tu jouais quand je ne faisais que souffrir
Tes succins baisers qui jamais vraiment n'embrassent,
eurent raison de moi mais pas de mes soupires
Là j'aurais aimé de retour du cimetière,
que mes larmes d'en haut croisent celles d'en bas,
tes laits d'étuves aux sordides aigrières,
et sentir mes baisers dans ton cul noir et gras
Je ne me dérobe qu'à l'astre sans lueur
de tes rutes faits de précipités d'orgueils
J'étais la gravure gay de ton livre d'heures,
celle qui brisée de licence, embouche et treuille
Je ne suis plus qu'un gars fait de deuils et d'ordures
Je pleure et je bande, je refuse la mort,
j'appelle la vie et ta raie rousse d'aiglures
à la mâchoire de loup couleur d'aigremort
Terminé le 22 mars 2024 par A.C-M, Clermont-Ferrand